L'enjeu prioritaire de la restauration et de la préservation des zones humides
Dans cet article, Acclimaterre 360 présente une synthèse sur l'état alarmant des zones humides en France en y évoquant quelques causes, particulièrement liées à l'activité humaine et à l'inaction des pouvoirs publics jusque récemment. Vous y comprendrez pourquoi il est urgent de préserver et de restaurer ces espaces et y trouverez quelques exemples non exhaustifs de bonnes pratiques.
COMMENT AGIR ?
Les zones humides sont des écosystèmes précieux qui jouent un rôle essentiel dans la préservation de la biodiversité et la régulation des ressources en eau. Cependant, ces zones sont de plus en plus menacées par les activités humaines et les changements climatiques. À l'occasion des journées mondiales des zones humides, qui se déroulent du 2 au 29 février, il est important de souligner l'urgence de restaurer et de préserver ces écosystèmes fragiles.
Les zones humides sont des zones tampons situées entre les zones terrestres et les zones aquatiques. Elles présentent une grande variété source d’une grande biodiversité : tourbières, marais, mares, forêts alluviales, prairies, milieux marins de type récifs coralliens, rives des étangs et des cours d’eau. Dans ces milieux, la qualité de l’eau est le facteur déterminant pour la vie animale et végétale.
Les détériorations des zones humides
Les zones humides subissent de nombreuses détériorations dues à l'urbanisation, à l'agriculture intensive, à la pollution et aux changements climatiques. La destruction des zones humides entraîne la perte de biodiversité, la diminution de la qualité de l'eau et l'augmentation des risques d'inondations. Selon l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), près de 87% des zones humides ont disparu depuis le début du XXe siècle.
La France a adhéré à la Convention de Ramsar sur les zones humides adoptée aux Nations-Unies en 1971. Pourtant, la superficie des zones humides en France n’a cessé de régresser essentiellement du fait de l’action humaine. Assèchement volontaire (pour causes sanitaires), aménagements urbains, drainage, destruction des haies contribuent à la disparition massive des zones humides en France. Par ailleurs, le rejet des eaux de refroidissement utilisées pour les centrales nucléaires contribuent à l’augmentation de la température des eaux. Ce phénomène est augmenté par le changement climatique avec un impact non négligeable sur les écosystèmes. Cette augmentation de la température modifie la composition biochimique des espaces humides. Cela a un impact sur les modes d’alimentation, de reproduction et de migration d'espèces dont la répartition est de moins en moins hétérogène. Les assèchements estivaux entraînent également une forte mortalité notamment chez les espèces peu mobiles (batraciens par exemple).
D’après les données ministérielles, la moitié des zones humides françaises a disparu entre 1960 et 1990. Le phénomène se poursuit. Depuis 2000, la moitié des zones humides restantes s’est dégradée souvent très fortement. Seuls 10% ont vu leur état s’améliorer malgré 4 plans nationaux sur les milieux humides (le dernier en date 2022-2026). Par ailleurs, au cours du siècle dernier, les eaux fluviales se sont réchauffées de 1 à 3 degrés tandis que les taux d’oxygène diminuent rapidement dans les lacs, les fleuves et les rivières. Cela contribue à l’augmentation de la mortalité des espèces aquatiques et de celles qui s’en nourrissent tandis que prolifèrent des bactéries et algues émettrices de gaz à effet de serre.
Les plans nationaux d'action français
Face à cette situation alarmante, la France a mis en place des plans nationaux d'action pour la restauration et la préservation des zones humides. Ces plans visent à protéger les zones humides existantes, à restaurer les zones dégradées et à créer de nouvelles zones humides. Ils prévoient également des mesures pour sensibiliser le public à l'importance de ces écosystèmes et pour promouvoir des pratiques agricoles durables.
Les plans nationaux d'action français sont basés sur une approche intégrée, qui prend en compte les enjeux écologiques, économiques et sociaux liés aux zones humides. Ils impliquent la collaboration entre les différents acteurs, tels que les collectivités locales, les associations environnementales et les agriculteurs.
Acclimaterre 360 sera vigilante quant à l’effectivité du 4e plan national visant à la protection des zones humides (2022-2026) lancé dans le cadre de la stratégie nationale biodiversité 2030. Nous constatons avec inquiétude que ce quatrième plan a été élaboré quatre ans après la fin du troisième plan (2014-2018) alors même que la disparition des milieux humides ne cesse de s'accélérer notamment depuis 2020. Le budget de 325 millions d’euros ne paraît par ailleurs pas à la hauteur des enjeux et cette enveloppe ne cessera d’augmenter si les mesures prévues par le plan ne sont pas réellement mises en œuvre.
Propositions de bonnes pratiques
Les espaces humides les plus dégradés se trouvent là où la concentration humaine est la plus importante, en particulier dans les vallées alluviales et sur les littoraux. Il est dans notre intérêt commun non seulement de les préserver que de les restaurer : chacun peut y contribuer à son modeste niveau :
Protéger les zones humides existantes en les intégrant dans des espaces naturels protégés.
Restaurer les zones dégradées en rétablissant les connexions hydrauliques et en favorisant la recolonisation par les espèces végétales et animales.
Créer de nouvelles zones humides en recréant des milieux favorables à leur développement.
Promouvoir des pratiques agricoles durables, telles que l'agriculture biologique et l'agroforesterie, qui préservent les zones humides et limitent les pollutions.
Sensibiliser le public à l'importance des zones humides à travers des campagnes de communication et des activités éducatives.
Effectivement, les zones humides permettent de retenir les crues alors même que le nombre de ces dernières ne cesse d’augmenter du fait du changement climatique. Elles permettent de purifier gratuitement les eaux alors même que les pouvoirs publics (y compris au niveau européen) semblent avoir pris conscience de l’urgence à agir contre les différents polluants notamment en milieu aquatique surtout au regard des coûts de plus en plus importants du traitement de l’eau potable et des coûts en matière de santé publique. D’après le BRGM, 43,3 % des eaux de surface sont polluées par des nitrates et des pesticides. Par ailleurs, les zones humides de type tourbière (environ 3% sur la planète) stockent deux fois plus de carbone que les forêts. En soutenant le débit des eaux en été, elles contribuent à rafraîchir l’air ambiant. Elles contribuent également à freiner la force des vagues et donc l’érosion sur les littoraux. Ce sont enfin des réservoirs de biodiversité et des espaces indispensables à la production de ressources alimentaires alors même qu’il est nécessaire de prendre conscience que les changements climatiques nous invite à anticiper une crise alimentaire.
Acclimaterre 360 porte plusieurs propositions concrètes visant à préserver, à restaurer et à créer des zones humides mais qui peuvent avoir également une effet bénéfique pour lutter contre les multiples effets du changement climatique :
limitation de nos rejets d’eaux chaudes.
réintroduction du castor dans les milieux adéquats.
création de mares dans les espaces domestiques et au cœur des espaces urbains collectifs avec système de pompe pour éviter les eaux stagnantes peu oxygénées.
cartographie des milieux humides dans les plans locaux d’urbanisme.
recharge artificielle des nappes souterraines.
lutte contre la pollution des cours d’eau
lutte contre l’artificialisation des berges, des sols
revégétalisation et désimperméabilisation des milieux urbains.
Meilleure gestion des eaux pluviales, stockage et réutilisation.
Réutilisation des eaux usées traitées.
La restauration et la préservation des zones humides sont des enjeux essentiels pour la préservation de la biodiversité et la régulation des ressources en eau. Les plans nationaux d'action français et les bonnes pratiques proposées sont des moyens concrets d'agir pour préserver ces écosystèmes fragiles à condition qu'ils soient réellement mis en place à l'aide de budget à la hauteur de l'enjeu. Il est crucial de sensibiliser le public à l'importance des zones humides et de promouvoir des actions concrètes pour leur restauration et leur préservation.
Pour en savoir plus:
https://senat.fr/rap/r22-871/r22-871.html
https://www.cerema.fr/fr/actualites/terres-eau-terres-avenir-recommandations-rapport
http://www.zones-humides.org (association Ramsar France - pour les zones humides)